19 janvier 2012

LA PRÉSENCE QUI APAISE



On n'est jamais croyant tout seul


Car le croyant est, comme tous les autres, dans un monde qui a ses violences, ses conflits, ses rivalités, ses douleurs de séparation, ses injustices, ses deuils. Croire, ce n’est pas planer. C’est placer ce monde-là, et pas un autre qu’on lui substituerait, dans la lumière et sous le regard de Dieu. Il ne s’agit jamais de s’abstraire ni de se soustraire. C’est l’inverse. Il faut avancer, décider, choisir dans les conditions du réel. Comme tout le monde. Le croyant n’échappe ni au doute, ni à la confusion. Il n’est pas épargné. Il peut lui arriver de se sentir abandonné, de livrer des combats intérieurs épuisants… Pourquoi le cacherait-on ? Pourquoi faudrait-il faire semblant ? L’épreuve fait partie de la vie. Mais on n’est jamais croyant « seul ». On l’est dans un peuple, au milieu des autres. Et si l’on tente d’être lucide sur soi et sur les autres, on reconnaît que la foi transforme profondément le regard, dissipe les méfiances inutiles. Elle pousse à demander de l’aide quand c’est nécessaire, elle appelle, elle accepte de ne pas tout donner mais aussi de recevoir des autres la présence qui apaise. Elle permet que circule entre les humains la Vie secrète mais tellement puissante qui vient de Dieu. Quelle force, même sous les apparences de la plus grande faiblesse ! Quel sujet d’émerveillement ! Quelle joie oui, quelle joie profonde, même au milieu des larmes !

Ainsi peut-on comprendre le "Réjouissez-vous" qui circule entre nous. Il est au-delà ou en deçà des exultations qui font aussi partie de la vie de foi. Oui, réjouissons-nous de la présence du Seigneur, prenons le temps de nous en parler, de nous la rappeler les uns aux autres, de la célébrer. Mais nous ne saurons nous réjouir vraiment de la Présence si nous ne sommes pas attentifs à nous désencombrer, si nous ne faisons pas place dans nos vies au silence, si nous ne déposons pas nos fardeaux devant le Seigneur. Sinon, comment entendrions-nous les paroles de l’Apocalypse : 
Je me tiens à la porte et je frappe, si quelqu'un entend ma voix et qu'il ouvre, j'entrerai chez lui...  Ap. 3, 20. 
Là est la source de la joie, mystérieuse et rayonnante, à ne pas confondre avec des manifestations bruyantes qui risqueraient d’être vides et sans écho.

Françoise Le Corre, philosophe, écrivain
In Cahiers croire, croire.com, en ligne 

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